Frère Christian Ngoura SM

Frère Christian Ngoura SM

INTRODUCTION                       

Selon le Grand dictionnaire encyclopédique Larousse, le mot martyre tient sa racine du grec « marturos »[1] qui signifie témoin. C’est donc une forme de vie ou de mort  par laquelle une personne témoigne de sa foi jusqu’au sacrifice sublime au nom de ses convictions. La plupart des religions du monde ont des formes de martyre diverses qui varient selon les croyances, les convictions et les milieux géographiques. Dans le cadre du christianisme, c’est un acte héroïque qui consiste à s’offrir totalement par amour pour le Christ. Les martyrs de l’Ouganda en acceptant de mourir, de mépriser les biens de ce monde pour aspirer aux biens éternels ont donc été des témoins fidèles du Christ. Toutefois, dans quel contexte politique, religieux et social l’ont-ils fait et quelles étaient leurs motivations ? Comment s’est déroulé leur supplice et quelles ont été les conséquences au niveau de l’Eglise? La réponse à ces multiples interrogations, constituera les différentes étapes de notre réflexion.

 

  1. LE CONTEXTE HISTORIQUE DE L’OUGANDA
  1. Situation politique

Pays de l’Afrique de l’Est, le Bouganda, actuel Ouganda est limité au Nord par le Soudan, à l’Ouest par la République Démocratique du Congo, le Rwanda et la Tanzanie au Sud et à l’Est par le Kenya. Lorsque les Pères Blancs arrivent en Ouganda en 1879, notamment les pères LOURDEL et LIVINHAC[2], le pays est dirigé par le Kabaka [3]dont le nom est MUTESA. A la suite de nombreuses oppositions avec les Arabes, les missionnaires après sept mois de catéchuménat, vont pressentir la persécution et vont se retirer au  sud du Lac Victoria. A leur deuxième tentative en 1885, c’est MWANGA, fils de MUTESA qui est le nouveau Kabaka. Plus disposé et accueillant que son père, le nouveau Roi va ouvrir totalement les portes de son royaume aux missionnaires et confier les meilleurs charges de son gouvernement aux néophytes[4]chrétiens. C’est ainsi que ces néophytes vont découvrir une conspiration dirigée par le Katikiro [5] contre le Roi et vont avertir ce dernier. Arrêté et interrogé, le Katikiro va mentir au Roi en protestant sa fidélité. Pardonné, il va jurer la mort des chrétiens et s’engagea à les faire mépriser du Roi comme étant des personnes dangereuses, des conspirateurs. Il est important de noter qu’au moment où tous ces événements se déroulent, Joseph MUKASA est le conseiller intime du Roi et aimé de tous. Au-delà de ce contexte politique, la situation religieuse de l’Ouganda est aussi remarquable.

  1. Situation religieuse

De façon générale,  la plupart des africains, particulièrement les Bantous de l’Ouganda étaient des fétichistes à l’arrivée des premiers missionnaires. Très sensibles aux signes des temps, ils gardent de grandes dévotions et respectent la tradition. A cette époque on s’adresse au Roi en l’appelant Sébo Kabaka c’est-à-dire Monseigneur le Roi. En Juillet 1885, avec l’arrivée de MWANGA, la mission des Pères Blancs retrouve son éclat. C’est ainsi qu’il leur confia une bananerais. Il leur exprimait constamment son amour,  les recevant avec beaucoup d’honneur, ce qui faisait la grande joie au sein des priants. Relevons  ici que pendant le règne de MUTESA, les catéchistes enseignaient déjà aux croyants une catéchèse appropriée sur la personne de Jésus. C’est pourquoi dès l’arrivée de nouveaux évangélisateurs, les frères du village qui connaissaient déjà certaines prières les récitaient. Avec MWANGA, Joseph MUKASA jeune homme âgé de 25 ans, était considéré comme L’homme de la paix ; on l’avait même surnommé Balikuddembe[6], il était le chef de la maison du Roi. C’est André KAGGWA et sa famille qui reçurent en premier le baptême en Ouganda. Luc BANABAKINTU était le catéchiste qui instruisait les catéchumènes ; il était chargé d’organiser la prière tous les jours, les réunions avec les chrétiens où chacun venait  raconter ce qu’il fait dans son milieu de vie.

L’Animisme et l’Islam existaient déjà en Ouganda ; raison pour laquelle le premier ministre était contre les chrétiens. La majorité des chefs refusaient la parole de Dieu et voulaient qu’on fasse seulement des sacrifices aux génies, que l’homme ne puisse épouser qu’une femme. Pour eux, c’est la religion du Prophète MAHOMET qui parait plus facile ; or c’est le contraire, c’est là une preuve du manque de confiance de la part de l’Islam. Cela  se vérifie avec cette envie du Katikiro de prendre la place de MWANGA en tant que Roi. A cause du refus des jeunes pages d’obéir aux mauvais désirs du Roi, commandant des actes contraires à la volonté de Dieu, ils se verront persécutés dans leur vie quotidienne sur toutes les formes.

  1. Situation sociale

La situation sociale était complexe à cette époque car il y avait non seulement un attachement à la tradition ancestrale, mais aussi et surtout le non-respect de la dignité humaine. Le Roi, seul souverain pouvait faire de ses sujets ce qu’il voulait. Il y avait l’homosexualité, la pédophilie et les séquelles de la traite négrière ; car elles étaient encore visibles sous différentes formes. Nous notons aussi la pratique de la sorcellerie qui avait pour but de protéger le royaume et de repousser les esprits maléfiques. La société ougandaise vivait dans la peur et la crainte parce que les hommes n’étaient pas libres, comme dans la plupart des sociétés africaines de cette époque. L’arrivée des missionnaires va donc bouleverser ce pays et pousser des croyants courageux à dire oui au Christ en rejetant les pratiques qui sont contraires à la foi chrétienne.

 

  1. LE MARTYRE
  1. Les  causes
  • La haine des non croyants

« Presque tous les chefs refusent la parole de Dieu car ils pensent que s’ils ne font plus de sacrifices aux génies, ne vont-ils pas se venger? Est-ce qu’ils doivent renvoyer toutes leurs femmes pour en garder une seule ? »[7] Toutes ces interrogations  sur les exigences de la vie  chrétienne en suscitent d’autres : « quand ils partent faire la guerre, est-ce qu’ils vont refuser de voler et de tuer comme André KAGGWA, Jean-Marie FUWUKE et Jacques BUZABALIAWA ? Quand ils rendent des services, est-ce qu’ils vont refuser l’argent comme Joseph MUKASA BALIKUDDEMBE ? (…) Doivent ils changer leurs habitudes ? Lutter contre l’alcool, abandonner leur vie corrompue, ne plus se venger ? »[8] Toute cette série de questions pousse les chefs à entrevoir la nécessité de vivre, non pas comme les chrétiens, mais à voir d’un œil plus honorable la religion du prophète  MAHOMET qui parait plus facile (qui semblait leur donner plus d’avantages, entre autre la polygamie, par apport  à la religion chrétienne qui prônait la monogamie).

  • La révolte de Joseph MUKASA

Lors d’une visite des missionnaires anglicans au Roi, pour lui annoncer l’arrivée de leur évêque  venant les voir avec d’autres missionnaires, MWANGA donne l’ordre de tuer Monseigneur James HANNIGTON, car il a peur que ces Anglais mangent l’Ouganda (annexer le pays) (…) Alors MUKASA se lève et dit au Roi ! Sebo kabaka, tu ne dois pas avoir peur de cet étranger. Refuse-lui d’entrer, mais ne lave pas tes mains dans le sang. Ton père MUTESA n’a jamais fait cela.»[9] A cette réaction de Joseph MUKASA le Roi pense aussi qu’il faut le supprimer, car il fait preuve de désobéissance et de révolte ; cela pourrait influencer son pouvoir devant ses serviteurs. MUKASA aide aussi  le jeune KISITO qui était très beau à ne pas céder aux avances du Roi, pour réaliser ses désirs pédophiles et homosexuels, car cela est contraire aux normes de la croyance.

  • La haine du premier ministre

Le ministre de MWANGA a une antipathie particulière envers les chrétiens et les accusent d’influencer ses enfants en leur apprenant à prier, il demande au Roi de mettre à mort tous les priants en particulier les leaders dont Joseph MUKASA. 

  • La colère du Roi

La colère du Roi envers les chrétiens vient du fait que « les priants ne font pas de sacrifices aux dieux de la tribu. Ils refusent de voler leurs ennemis et de les tuer quand ils font la guerre. »[10] Alors le Roi se demande : « Que va devenir mon royaume si tous mes serviteurs deviennent chrétiens ? »[11]. Le Roi ayant donc constaté que ses serviteurs chrétiens ne lui obéissent plus, commença à enfermer tous les priants et a tuer ceux qui refusaient de l’écouter.

  1. Présentation des Martyrs d’Ouganda

Nous notons que dans l’histoire des martyrs de l’Ouganda, ils avaient pour la plupart entre 16 et 24 ans. Voici la liste des 22 martyrs suivant l’ordre d’exécution:

Joseph MUKASA BALIKUDDEMBE, Denis SSEBUGGWAO WASSWA, André KAGGWA , Pontien NGONDWE, GONZAGUE Gonza,  Athanase BAZZEKUKETTA, Matthias MULUMBAKALEMBA WANTE, Noé MAWAGGALI, Charles LWANGA , Bruno SERONUMA  ou SERONKUMA, Achille KIWANUKA, Adolphe LUDIGOMUKASA, Ambroise KIBUKA, Anatole KIRIGGWAJJO, Jacques BUZABALIAWO, Gyavira MUSOKE, KIZITO, Luc BANABAKINTU, TUZINDE , Mgagga LUBOWA, Mukasa KIRIWANWU et Jean Marie MUZEYI.[12]

Dans le souci de connaitre certaines des figures qui ont marqués l’histoire de ces martyrs, nous allons nous appesantir sur trois de ces derniers dont les noms nous sont familiers.

  • Joseph MUKASA BALIKUDDEMBE

MUKASA est né dans le comté de Mawakota, aux rives du lac Victoria, dans le royaume de l’Ouganda. Il était parmi ceux qui avaient critiqué la position du souverain au Palais. Il enseignait aussi la doctrine du Christ et combattait les pratiques d’homosexualité du Roi, et certaines mauvaises ingérences. Dans sa colère et dans sa honte, le Roi ordonna son exécution, prétextant qu’il ne pouvait recevoir de remontrances de la part de ses sujets. BALIKUDDEMBE, tué le 15 novembre 1885 à Mengo, devint le premier martyr catholique noir  Ougandais.

  • KIZITO

Né en 1873, KIZITO était le plus jeune des martyrs catholique de l'Ouganda. Il avait environ quatorze ans quand il est mort. Aucun nom de baptême n'a été enregistré à son égard, car il a été baptisé en hâte par Saint Charles LWANGA dans la nuit du 25 mai 1886, avant d'être condamné à mort pour sa foi par le Roi MWANGA le jour suivant. On note ici que pendant son supplice, ce jeune martyr demeure inébranlable dans sa foi d’autant plus qu’il encourageait ses autres compagnons.

  • Charles (Karoli) LWANGA

Né en 1860 ou 1865 et mort le 03 juin 1886 à Namougongo avec les 21 autres martyrs, LWANGA a été Converti par les Pères Blancs et baptisé en novembre 1885. Il fut brûlé vif au mois de juin.

 

  1. Le supplice des martyrs de l’Ouganda

La toute première victime du carnage de l’Ouganda fut le conseiller du Roi, Joseph MUKASA. Même le bourreau cherchait à retarder son exécution, mais il reçut l’ordre du KATIKIRO de le tuer sur place ; il fut donc décapité, avec deux ou trois  pages de la cour. Avant de mourir, il laissa cette consigne au bourreau : « dis à MWANGA ceci : Je lui pardonne de me faire mourir sans raison. Mais il doit changer de vie sinon, je parlerai contre lui au tribunal de Dieu ! ».[13] Il avait confiance qu’un jour il y aura une justice divine, reprenant ainsi les mots de Saint AUGUSTIN lorsqu’il écrit : « la cause de la résurrection des morts est la justice divine »[14].

Mathias MULUMBA a été capturé avec sa mère, par un groupe de Ganda du clan des loutres, qui faisaient un raid. Les bourreaux se sont attaqués à lui sur place, lui coupant les bras et les jambes, et lui arrachant des lambeaux de chair pour les brûler devant lui. Son courage et sa résistance ont été extraordinaires, et les seules paroles qu’il prononça ont été, « Mon Dieu! Mon Dieu! ». Les bourreaux lui ont ensuite ligoté les artères et l'ont laissé sur place pour qu'il meurt lentement.

Charles LWANGA était un Ganda du clan des cerfs sauvages (ngabi). Le trois juin, avant de tuer l'ensemble des prisonniers, les bourreaux ont mis Charles LWANGA à mort sur un petit bûcher funéraire en haut d'une colline qui surmontait le site des exécutions. On lui a permis d'arranger le bûcher lui-même, et ensuite, il a été enveloppé d'une paillasse de roseaux, et on lui a mis un joug d'esclave au cou. Afin de le faire souffrir davantage, on a d'abord allumé le feu sous ses pieds et ses jambes. Ces membres de son corps ont été brûlés jusqu'aux cendres avant qu'on ne permette aux flammes d'atteindre le reste de son corps. Raillé par les bourreaux, Charles leur déclara qu’en le brûlant, c'est comme s’ils  étaient en train de verser de l'eau sur lui. Ensuite, il est resté doucement dans la prière. Juste avant la fin, il s'est écrié d'une voix forte « Katonda," -- "Mon Dieu ». Tous les autres ont été tués d’une façon quasi-similaire, réalisant cette pensée de TERTULIEN : « nous aimons mieux être condamnés que d’être infidèles à notre Dieu »[15].

 

  1. CONSEQUENCES DE LEUR SACRIFICE
  1. Conséquences politiques

Le Roi MWANGA qui était le principal persécuteur de la religion chrétienne a été chassé de son trône royal. Après son exil, il reçut l’aide des missionnaires catholiques et protestants et regagna son trône en février 1890 après un bon bout de temps passé à l’extérieur de son palais. Son retour au pouvoir a permis à l’Ouganda par la collaboration des missionnaires de signer un accord anglo-allemand qui permettra le développement du pays et du christianisme. Pour qu’il soit signé, il a fallu que le père LOURDEL écrive à Peter qui était un agent de la German East Africa Compagny (société allemande de l’Afrique de l’Est) et à JACKSON qui était un agent de la société impériale britannique de l’Afrique de l’Est. Les fruits de  toutes ces conséquences seront une stabilité politique et sociale.

  1. Conséquences sociales

Le christianisme a constitué un facteur important pour la cohésion sociale en Ouganda. Grace à lui, de nombreux clans se sont réconciliés pour faire Communauté. En plus, la religion a permis la construction de nombreux édifices notamment l’Église de RUSAGA, bâtie sur le site de l’ancienne résidence royale.

  1. Conséquences religieuses

La mort de Joseph MUKASA a donnée aux chrétiens beaucoup de courage au point où ils n’avaient plus peur de la persécution et de la mort. Après la mort de Jean-Marie MUZEYI le 27 janvier 1887, dernier des martyrs de l’Ouganda, on est passé environ de 500 chrétiens à 1000 catéchumènes. 20 ans après, le pays comptait environ 100 000 chrétiens et 150 000 catéchumènes.[16] 30 ans après, l’évêque du lieu peut compter sur 88 prêtres, 11 frères, 38 religieuses et 1244 catéchistes.[17] Béatifiés le 06 Juin 1920 par le pape Benoît XV, ces martyrs ont été canonisés par le pape Paul VI  le 18 Octobre 1964  au cours du Concile Vatican II, en présence de 2.000 évêques rassemblés à Rome. En Ouganda, le trois juin est un jour de fête pour les catholiques du pays. Chaque année, un pèlerinage est organisé à la Basilique des martyrs de l’Ouganda[18] à NAMUGONGO. En 1978, l’Eglise d’Ouganda comptait environ quatre millions de catholiques sur 11 millions et demi d’Ougandais.[19] Actuellement la religion catholique romaine y est majoritaire, représentant 45% de la population ; ensuite viennent les anglicans avec 39% et les musulmans avec 10%[20]. La mort de tous ces martyrs a permis la visite pour la première fois d’un Pape en Afrique en 1969, ainsi que la collaboration entre les missionnaires anglicans et catholiques.

 

  1. LE SACRIFICE SUPREME DES MARTYRS DE L’OUGANDA AUJOURD’HUI
  1. Dans l’Eglise universelle

De nombreuses personnes ne cessent de travailler à accroitre l’Eglise universelle à travers leurs Sacrifices héroïques, leur témoignage de vie et leur fidélité au Christ allant jusqu'au sacrifice sublime de leur vie. Les martyrs de l’Ouganda en sont des exemples remarquables aujourd’hui, car depuis leur mort en 1886 il y a eu des moments essentiels dans le souvenir et la célébration de leur vie ainsi que celle de leur mort héroïque. A la suite de tous les martyrs qui les ont précédés dans le monde, ils ont été des témoins courageux de l’Evangile. Parmi les moments les plus importants, il y a eu le jubilé d'argent de leur martyre en 1911,  les jubilés d'or et de platine de leur martyre en 1936 et en 1961 respectivement, le centenaire de leur martyre en 1986 et enfin le jubilé d'argent de leur canonisation en 1989. Toutes ces occasions ainsi que leur fête patronale célébrée comme un mémoire obligatoire le 03 juin dans l’Eglise universelle rassemblent à NAMUGONGO des centaines de milliers de pèlerins venus de tous les pays du monde. Ce sacrifice au nom de la foi en Jésus-Christ des martyrs de l’Ouganda,  a donc semé dans l’Eglise universelle des graines impérissables.

  1. Dans l’Eglise d’Afrique

TERTULLIEN, père de l’Eglise du IIème siècle nous rappelle que « le Sang des martyrs est la semence des chrétiens »[21]. Ceci dit, partout où il y a eu des martyrs, le bon grain a germé, et les moissons ont été magnifiques. C’est le cas  en Afrique Orientale, où les jeunes saints de l’Ouganda ont fait rayonner l’Eglise d’Afrique par leur sacrifice. Après leur mort, quelques mouvements sont nés, notamment, l’association œcuménique des Martyrs de l'Ouganda [UMG] fondé par Mgr Joseph STREICHER, ayant contribué à faire connaitre les martyrs et à encourager leur dévotion dans toute l’Afrique et en dehors ; les BANNAKIZITO, fondé pour les enfants en 1964 par Cyprian K. LWANGA, archevêque de KAMPALA à cette époque. Tout ceci est le résultat d’un amour indéfectible pour le Christ. Monseigneur LIVINHAC dira d’ailleurs:« La béatification des martyrs de l'Ouganda annoncera un renouvellement spirituel notable dans la vie surnaturelle de notre Société ; le commencement, pour ainsi dire, d'une nouvelle époque de piété, de zèle, de générosité et de régularité, remarquable, par conséquent, par des œuvres saintes qui rendront grande gloire à Dieu et lui apporteront des milliers d'âmes. »[22] Le KA[23] est un mouvement d’action catholique en R.D.C  qui regroupe des jeunes garçons (Kizito) et des jeunes filles (Anuarite) dont la tranche d’âge varie entre 7 et 14 ans. Le but de ce mouvement étant de former ces jeunes à une vie chrétienne et humaine, nous notons par ailleurs que ce groupe s’inspire des martyrs de l’Ouganda ainsi que des autres mouvements d’actions Catholique (Scout, Xaveri, J.O.C etc.). Le groupe des Kizito est fondé le 17 Novembre 1979 et le groupe des Anuarite le 11 avril 1982. Ces derniers passent ainsi par l’Initiation qui est similaire au martyre subit par les 22 de l’Ouganda. Cela se passe dans un cadre imaginaire dans lequel les enfants sont présentés comme des héros, en route vers le lieu de leur supplice et dont,  le but est celui d’en ressortir dans une vie nouvelle. La devise des Kizito est : « Prenons Courage », ces mots que les martyrs utilisaient pour s’encourager quand ils étaient en route pour le bûcher à Namougongo, celle des Anuarite est : « Servir et faire plaisir » ; ce qui fut sa devise dans sa vie religieuse.  Nombreux sont les principes qu’ils optent à appliquer, entre autre la persévérance, la piété, le Bon tour etc. Nous dirons ainsi les K.A s’inspirent de la Foi, des Vertus et du Courage de leurs Saints Patrons pour suivre le Christ et préparer leur avenir. Cette prophétie se réalisera et fera grandir l’Eglise dans notre cher continent.[24]

  1. La valeur du martyre aujourd’hui

Vénérés aujourd’hui par les Catholiques, les Anglicans, et les Luthériens, les martyrs de l’Ouganda restent des véritables rayons de lumière dans le monde actuel. Ceci dit, le martyre conserve encore sa valeur en dépit des multiples changements d’époques et de mentalités. Toutefois le martyre de sang existe encore bien que le plus répandue soit le martyre blanc où des hommes et des femmes consacrent totalement leur vie au Christ. « Premiers martyrs noirs béatifiés »,[25] les martyrs de l'Ouganda en menant donc une vie d'engagement chrétien profond, vie qui les a équipé du sacrifice héroïque restent des modèles. Nous avons beaucoup à apprendre non seulement de la manière dont ils sont morts, mais aussi de la manière dont ils ont vécu. Charles de FOUCAULD nous demande d’ailleurs de rester éveillé lorsqu’il conseille de : « vivre comme si tu devais mourir martyr aujourd’hui »[26].

 

CONCLUSION

En définitive, il s’agissait, tout au long de notre travail de présenter les martyrs de l’Ouganda, en partant de sa situation politico-sociale et religieuse pour aboutir aux causes, aux motivations, aux conséquences et aux fruits que l’Eglise universelle tire aujourd’hui de ces courageux témoins de l’amour du Christ et de l’Evangile. Il en ressort donc de notre analyse que l’Ouganda bien qu’ayant les caractéristiques de la plupart des sociétés africaines, c'est-à-dire animiste, hiérarchique, s’est ouvert peu à peu au monde à l’annonce de l’Evangile. La catéchèse fut le moyen idoine pour la transmission des valeurs chrétiennes aux néophytes du christianisme. Aussi, enracinés dans une foi inébranlable, la motivation de cette offrande reste l’amour du Christ qui passe par l’affirmation de la vérité. Il sied de constater que  l’Eglise a tiré beaucoup de fruits de ces martyrs qui, d’abord en Ouganda, puis en Afrique et dans le monde entier continuent d’être des modèles du sacrifice suprême et de la fidélité totale au Christ. Nous n’avons cependant pas la prétention d’avoir épuisé tous les différents rouages de cette analyse ; car de nombreuses interrogations subsistent encore, particulièrement celle de savoir si la transformation de nos structures sociales mauvaises ou injustes ne passe pas par une autre forme de martyre, basé exclusivement sur l’amour du prochain ?

Frère Christian Ngoura SM 

 

[1] Jean DIDIER, Grand dictionnaire encyclopédique Larousse, Paris, éd. Larousse, 1960-1964, p. 6716.

[2] Ce sont les Missionnaires d’Afrique fondé par le cardinal LAVIGERIE.

[3] C’est le Roi.

[4] C’est un adepte récent d’une religion.

[5]Dénomination du Premier Ministre.

[6] C’est l’Homme de la paix.

[7] Munaku TAKULAKA, Les Martyrs De L’Ouganda, Paris, éd. Saint-Paul, 1977, p. 11.

[8]Ibidem, p. 12.

[9]Idem, p.19.

[10]Ibidem, p. 12.

[11]Idem

[12]http: // www.abbaye-saint-benoit.ch/hagiographie/fiches/f0119.htm, consulté le 15 février 2015 à 20h45.

  1. Munaku TAKULAKA, Op. Cit., p.22.

[14] Saint AUGUSTIN Tome 4, Question 56. a 1. p. 406.

[15]Apologétique, Les belles lettres vers l’année 220.

[16]Ibidem, p.49.

[17]Bruno KIEFER, nouvel. Evangélisation. Free.fr/ martyrs Ouganda. Htm, consulté le 03 mars 2015 à 21h 50.

[18]http:// en.m.wikipedia. org/wik/ Uganda-martyrs, consulté le 08 avril 2015 à 20h 45.

[19] Munaku TAKULABA,Op.Cit., p. 49.

[20]Bruno KIEFER, Op.Cit.

[21]. Eusèbe, « Apologie », http:// www.sources-chretiennes.mom.fr/index.php?, consulté le 24 février à 15h20.

[22]http://www.africanmission-mafr.org / golden_jubilee_martyrs Ouganda_canonisation_fr.htm, consulté le 22 février 2015 à 21h 55.

[23]K.A « KISITO et ANUARITE »

[24] Pierre Bosanga et son équipe, Initiation des KIZITO et des ANUARITE, Kinshasa, Diffusion Centre d’Etude Pastorale, 1985, Passim.

[25] A. J. M. Mausolfe & J. K. Mausolfe, Saint Companions for Each Day, éd. St Paul, Mumbai, 2005, p. 202.

[26] Dictionnaire des citations Chrétiennes, p. 352.

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